Guides-conférencier.ères
Formation, professionnalisation, activité, carrière
Au cours des années 2010, de nombreuses réformes ont transformé les conditions d’exercice de la profession de guide. En 2011, les cartes de guide-interprète, de conférencier.ères national.e et de guide-conférencier.ères des villes et pays d’art et d’histoire ont disparu au profit d’un unique statut, celui de guide-conférencier.ère . Ces guides appartiennent à la catégorie des animateur.trices qui prennent en charge une médiation de contenus mobilisant des connaissances spécialisées.
Absent.es du répertoire des métiers du ministère de la Culture, ils et elles sont défini.es par le ministère de l’Économie et des finances comme « un médiateur culturel qui conduit des visites, des conférences dans les territoires et les lieux patrimoniaux, dans une démarche de valorisation du patrimoine ».
Alors qu’ils et elles exercent une profession règlementée, ils et elles représentent un groupe professionnel aux contours difficilement identifiables, directement confronté aux effets de la dé-standardisation du travail (Guibert et Réau, 2021). Leur activité est réinterrogée par l’évolution des pratiques culturelles et touristiques, comme l’introduction des nouvelles technologies dans les musées et les lieux de patrimoine, autant que par les prestations alternatives offertes par des groupes concurrents. Tout cela pèse sur les modalités de carrière et la morphologie d’une population féminisée et dont le niveau de diplôme est élevé.
Ces caractéristiques en font un observatoire riche pour saisir les liens entre des transformations observables à des échelles hétérogènes. Dans cette perspective, le séminaire croise des approches sous les angles de la sociologie du travail et de l’emploi, de l’action publique, de l’anthropologie, de la géographie, de l’économie, de l’information-communication et de la muséologie, autour de trois thématiques principales.
Les frontières contestées d’un groupe professionnel
S’il est considéré comme un métier central dans les politiques de démocratisation culturelle, le guidage se distingue par l’ampleur du flou qui l’entoure (Peyrin, 2010). Celui-ci semble paradoxal au regard de l’ancienneté de l’activité, désormais rendue obligatoire dans certains secteurs, comme les musées de France, et compte tenu des moyens de régulation mis en œuvre sous la forme de cartes professionnelles.
Le groupe oppose pourtant une résistance durable à sa délimitation (Ibid.; Uzlyte, 2016), d’abord en raison d’une terminologie très flottante, dans laquelle les guides-conférencier.ères se confondent avec les animateur.trices ou les médiateur.trices. Ensuite parce que la forte segmentation de l’offre de visite rend toute tentative de délimitation par l’activité malaisée.
Aussi, le premier axe de travail concerne-t-il l’analyse de la dynamique de professionnalisation, ou comment un ensemble de tâches est pris en charge par un groupe qui tente de faire reconnaître le monopole de son contrôle sur son exercice (Abbott, 1988). L’attention portée à la structuration du groupe, aux définitions concurrentes de son activité et aux instruments de clôture professionnelle va de pair avec une prise en compte des groupes concurrents, des zones grises (Bureau et al., 2019) entretenues voire renforcées par la plateformisation et la concurrence de guides amateurs, bénévoles ou exerçant cette activité à titre secondaire.
Segmentation de l’offre et redéfinition de l’activité
Activité ancienne, le guidage est en constant renouvellement, au gré de la transformation des pratiques culturelles et touristiques qui ont connu non seulement une intensification mais également une diversification au cours des cinquante dernières années (Lombardo et Wolff, 2020).
La forte segmentation de l’offre de visite, l’hybridation des dispositifs (telle l’intervention croisée avec des artistes ou des artisans), la diffusion des nouvelles technologies (Sandri, 2016), la plateformisation (Carelli et al., 2022 ; Bigot et al, 2022) du secteur touristique, l’intégration croissante des habitants et la valorisation du quotidien et de l’ordinaire (Loisy, 2021) dans un processus de patrimonialisation non-hégémonique conduisent à une redéfinition des prestations proposées.
La crise réactualise en outre la question des effets de la dématérialisation (audioguidage, visites à distance), quand les transformations de l’action publique redéfinissent l’organisation du travail, encourageant l’intensification des rythmes et l’émiettement des journées.
Quelles évolutions la transformation et les bouleversements du secteur touristique entraînent-ils sur la pratique professionnelle des guides-conférencier.ères ? Comment caractériser ces évolutions en matière de production discursive, d’évolution des profils et des statuts professionnels, d’adaptation des formations et de la certification ? Autrement dit, il s’agit d’interroger les modalités de définition des prestations et les rapports de force dans lesquelles elles s’inscrivent, ainsi que les nouvelles compétences et pratiques qu’elles induisent chez les guides.
Les défis du maintien dans la carrière : trajectoires d’emploi et pénibilité
Troisième caractéristique remarquable, les guides se distinguent par la faiblesse de leur intégration dans les institutions qui les emploient autant que par l’étroitesse des opportunités de carrière dont ils et elles jouissent (Peyrin, 2007), et qui contraste avec celles offertes à des titulaires de diplômes équivalents.
Partant de ce constat, le troisième axe pense les guides-conférencier.ères dans les termes de la carrière (Darmon, 2008), en posant la question des modalités d’entrée mais également de maintien dans cette activité. L’entrée par les trajectoires d’emploi s’impose face à une profession confrontée à la flexibilité des durées de contrat et des horaires, à une importante variation des tâches et des contextes professionnels, au recours à de multiples employeurs et aux conséquences de l’externalisation de l’emploi public. La réforme de l’assurance chômage ajoute à cette précarisation en intégrant les périodes chômées dans le calcul du montant du salaire journalier de référence.
Être guide suppose en outre un engagement du corps qui expose ces professionnel.les à passer, comme dans le cas des professions artistiques et du tourisme sportif, de la passion à l’usure physique (Guillaud, 2018). À l’instar des activités de service, l’âge pèse en outre sur ces attributs personnels, incluant la sexualité, qui sont, comme dans les métiers du service et de l’accueil (Schütz, 2018), une part du service vendu.
[1] Décret n° 2011-930 du 1er août 2011 relatif aux personnes qualifiées pour la conduite de visites commentées
dans les musées et monuments historiques, et Arrêté ministériel du 9 novembre 2011, modifié, relatif aux compétences requises en vue de la délivrance de la carte professionnelle de guide-conférencier aux titulaires de licence professionnelle ou de diplôme conférant le grade de master.[1] Portail de la Direction générale des Entreprises, https://www.entreprises.gouv.fr/fr/tourisme/conseils-strategie/metier-de-guide-conferencier, consulté le 01.09.2022.
Programme 2023
26 janvier 2023, 11h-13h
Christophe Guibert (ESTHUA, Université d’Angers), « Les usages différenciés des dispositifs de formation. Focus sur les guides-conférenciers.ères pendant la crise de la Covid-19 » ;
Lina Uzlyte (CRDT, Université de Reims Champagne-Ardenne), « L’évolution de la compétence du guide européen qualifié dans le champ de la médiation culturelle ».
RDV dans la salle Vivant-Denon, Ministère de la Culture (Bons Enfants) et en ligne sur Teams.
16 février 2023, 11h-13h
Léa Maroufin (Pacte, Université Grenoble Alpes, CRESPPA, Université Paris 8 Saint-Denis-Université Paris Ouest Nanterre), « Les guides de Chauvet 2 : le travail des émotions patrimoniales » ;
Anton Olive-Alvarez (CESSP, Paris I / EHESS et Mésopolhis, Aix-Marseille Université), « Des guides non-officiels pour un art non-officiel ? Ethnographie de visites guidées street-art à Paris et Bruxelles ».
RDV Salle Lanterne 4.1 et en ligne sur Team via ce lien
30 mars 2023, 11h-13h
Thi Thu Thao Nguyen (IREST, Paris 1), « Impacts de la crise du Covid sur l’activité des guides à Paris et politiques de soutien de la profession » ;
Claire Vivès (CEET et Lise, CNAM), « Salariées, allocataires de l’assurance chômage et indépendantes : les changements et cumuls de statuts et de rémunérations chez les guides conférencières ».
RDV Salle Lanterne 4.1 et sur Team via ce lien (ID : 344 402 133 334n code secret : GWZgZr)
20 avril 2023, 11h-13h
Pablo Livigni (IDHES, Université Paris Nanterre), « Les guides-conférenciers, un groupe professionnel face à l’incertitude sur le marché du travail » ;
Marion Demonteil (CEET, CNAM), Thomas Hélie (CRDT, Université de Reims Champagne-Ardenne), Ariane Lemieux (HiSCA, Paris I), Marion Mauchaussée (CEET et LIRSA, CNAM), Frédéric Poulard (Université Paris Cité, LCSP), Lina Uzlyte (CRDT, Université de Reims Champagne-Ardenne), Présentation de l’enquête Guides-conférenciers : professionnalisation, activité, trajectoires.
25 mai 2023, 11h-13h
Aurélie Condevaux (EIREST, Paris I), « La médiation touristique 2.0 : plateformes et transformations du travail pour les guides du tourisme virtuel »
Ariane Lemieux (HiSCA, Paris I), « Guide-conférencier.ère : mettre en récit le patrimoine».
29 juin 2023, 11h-13h
Thomas Hélie (CRDT, Université de Reims Champagne-Ardenne), « La culture en sous-traitance. L’externalisation des métiers du guidage et de la médiation culturelle en questions » ;
Marine Loisy (Lise, CNAM), « Transformations du secteur touristique et évolutions des professions de guide-conférencier.ère et guide touristique » ;
Étudiantes du master Gestion et Valorisation Touristique du Patrimoine (IREST, Paris I), retour sur une enquête menée auprès des guides non-encarté.es
Informations pratiques
Adresse des séances 2023
- Ministère de la Culture (Bons Enfants)
- 182, Rue Saint-honoré, 75 001 Paris
- Entrée libre sur inscription (contrôle à l’entrée)
S’abonner à la liste de diffusion Memento
- Envoyez un message à sympa@groupes.renater.fr avec l’adresse à partir de laquelle vous souhaitez vous abonner.
- En objet du message, écrivez (seulement) : subscribe mementoseminaire@groupes.renater.fr
- Laissez le corps du message vide.
- Vous recevrez ensuite un message vous informant que votre demande a été acceptée ou rejetée (regardez également dans vos courriers indésirables)